C’est depuis plus de trois semaines que la région de Beni et ses environs sont en proies à des opérations de l’armée nationale congolaise contre les ADF/Nalu qui semblent résister et même prendre de l’avantage sur terrain. En effet, selon plusieurs témoignages dont celui de la société civile de Beni, nos militaires éprouvent d’énormes difficultés à contenir ces rebelles qui ont opté pour la stratégie de guérilla à travers de petits groupes d’attaques mobiles éparpillés dans la région. Il est indécent de continuer à s’accrocher à une politique sécuritaire qualifié de "PLACEBO" qui conduit vers une catastrophe humanitaire avec plus de 100.000 personnes déplacées dans des conditions inhumaines et des villages entiers désertés. Au même moment le gouvernement, à travers une presse acquise, nous distille un discours d’apaisement en promettant un lendemain meilleur comme par enchantement.
Nous avons essayé de réveiller l’attention de nos dirigeants sur la menace qui guette nos compatriotes de cette partie du pays en publiant des articles sur l’infiltration de notre territoire nationale par des éléments du réseau terroriste affilié à Al-Qaïda. Malheureusement, le message n’a pas été bien pris par certaines personnes proches du pouvoir à Kinshasa qui ont multiplié des menaces à notre endroit. Qu’à cela ne tienne, nous persistons et signons que l’heure est gave et que tout congolais doit se mobiliser pour défendre la patrie en danger.
Dans le souci de mieux informer nos compatriotes sur la situation qui prévaut à l’Est de la RDC, nous avons échangé avec un collègue journaliste, spécialiste des questions géostratégiques qui assiste actuellement au 15è sommet de l’Union Africaine à Kampala. Ce monsieur estime qu’à l’heure actuelle le réseau terroriste ne peut être combattu efficacement que si l’on privilégie le renseignement humain et des opérations de forces spéciales. Toute autre stratégie ne pourrait que favoriser l’enracinement de ce réseau sur le territoire national.
Les services de renseignement ont avec l’information une relation souvent ambiguë. Matière première de leur activité, l’information est à la fois un «in put » et un «output », et c’est le processus de l’un à l’autre qui détermine l’efficacité des services de renseignement. Ainsi, un bon renseignement résulte d’un faisceau d’informations fournies par des sources indépendantes. Sa fonction première est de renseigner et non de collecter de l’information. Dans un monde où l’information abonde, ce n’est plus sa confidentialité qui est essentiel, mais la rapidité avec laquelle elle peut être traitée, validée par la confrontation avec la réalité et son intégration dans la prise de décision. Mais au centre de tout ce dispositif, il y a l’agent, l’humain dont les services de renseignement doivent s’assurer de sa loyauté.
Les responsables ougandais ont compris qu’il y a eu faille au sein des différents services de renseignement, ce qui a obligé le président Museveni à réunir tout le staff du métier.
Cette réunion a eu lieu le vendredi 23/07/2010 et, durant 5 heures de travail, les responsables du renseignement ont essayé de donner les raisons qui expliquent l’échec enregistré alors qu’ ils étaient au courant, depuis plus d’une semaine, d’une possible attaque terroriste sur Kampala. Ce qui nous a le plus intéressé dans les débats durant cette rencontre, ce sont les informations sur la RD Congo que nous résumons en ceci :"le projet de faire exploser des bombes à Kampala a été concocté par des ADF dans le camp de Nadui, qui est aussi leur QG situé dans le secteur de Eringeti à l’Est de la RD Congo où Jamil Mukulu alias le professeur dispose de 800 combattants en plus des enfants soldats. Tous les combattants sont des musulmans dont 40% d’Ougandais, les autres sont Congolais, Tanzaniens, Sénégalais, Somaliens ou des tiers de l’Afrique de l’Ouest. Toute leur formation se fait en Nadui camp, ils sont formés aux arts martiaux et depuis le début de cette année, ils ont constitué un groupe spécialisé dans le traitement des masques à gaz pour porter sur le visage. C'est une indication que ce groupe est susceptible de projeter du gaz sur la population. La formation de ces combattants est assurée par des instructeurs professionnels principalement des Pakistanais, des Somaliens et des Érythréens. Le plus grand lien qui relie ADF, Al Shabaab, Al-Qaida, Talibans en Afghanistan et au Pakistan, c'est que tous sont de la secte Salaf. L’adjoint de Jamil Mukulu est Musa Baluku qui est également l’Imam de la mosquée de Nadui. […] Quelques jours avant l’explosion des bombes, l’UPDF avait finalisé le plan d’envahir leur cachette de Nadui avec l’appui des Américain et de l’armée congolaise." En relisant soigneusement ces quelques points traités lors de la rencontre Museveni et les responsables des services de renseignement ougandais, on a froid dans le dos et l’on se demande si les autorités congolaises sont conscientes du danger qui couve réellement à l’Est du pays.
Le second point relevé par notre collègue, c’est que le réseau terroriste ne peut pas être défait par des opérations classiques de l’armée nationale mais bien par des infiltrations des forces spéciales au cœur du dispositif terroriste. Depuis plus d’un demi-siècle, la guerre a changé et les terrifiantes batailles de position ont perdu l’exclusivité des situation de guerre. Ainsi, les Forces spéciales suppléent-elles les pesanteurs et les risques des guerres conventionnelles. La multiplication des conflits dits "de basse intensité" (attaques terroristes, guérillas, etc.) requièrent de nouveaux guerriers, à la mesure de conflits nouveaux : surentraînés physiquement et mentalement, les membres des FS (Forces Spéciales) peuvent se glisser en territoire ennemi (montagnes, forêts, marécages, etc.) et y demeurer de longues semaines en parfaite autonomie, afin d’y exécuter les missions les plus dangereuses et d’enjeux stratégiques. Rapides, précis, discrets, ultra équipés, ces hommes travaillent de l’intérieur, comme à son insu, l’organisme à abattre. Les USA ont promis aux responsables ougandais une aide substantielle dans la formation et l’équipement des unités de FS.
En marge du 15è sommet de l’UA, il s’est tenu à Kampala le lundi 26/07 une réunion à huis clos des pays de l'Autorité intergouvernementale de développement d'Afrique de l'Est (Igad), consacrée à la situation précaire en Somalie en présence des bailleurs de fond. Le sous-secrétaire d'État américain aux Affaires africaines, Johnnie Carson, le commissaire européen au Développement, Andris Piebalgs ou encore le directeur Afrique du Quai d'Orsay, Stéphane Gompertz, étaient présents lors des débats. Il y a été réitéré l’engagement de la communauté internationale à combattre la progression des Chaabab et enrayer le terrorisme dans la région, après le double attentat perpétré à Kampala par le groupe armé afilié à Al-Qaïda.
Le déploiement de 2 000 soldats supplémentaires,promis par les pays de l'Igad, au sein de la Mission de l'Union africaine en Somalie (Amisom), qui en compte pour le moment 6 100, devrait se faire d'ici à quelques petites semaines. L'Ouganda devrait rapidement renforcer sa présence, et Djibouti pourrait également envoyer des troupes. La Guinée, par ailleurs, a promis d'envoyer un bataillon à l'Amisom. Jean Ping, le président de la Commission de l'Union africaine, a déclaré que cette dernière pourrait prochainement compter 10 000 hommes.
Nous estimons franchement que la présence du président Kabila aurait été salutaire pour la RD Congo car il avait des interlocuteurs valables pour poser le problème du pays et exiger qu’une attention soutenue soit accordée à la RDC pointée comme le vivier des ADF alliés aux El Shabaab. Malheureusement, il semble que le ministre congolais des AE, M. Tambwe Mwamba ait focalisé son discours sur la souveraineté de la RD Congo dont l’armée est en train de frapper les cibles ADF dans la région de Beni et ses environs. Ce qui aurait mis mal à l’aise l’Ouganda et surtout les partenaires occidentaux disposés à intervenir financièrement et matériellement afin qu’une stratégie globale soit adoptée par tous les pays de la région pour anéantir ce réseau terroriste. Terminons cette réflexion en paraphrasant M. James Dean qui disait :"Puisqu’on ne peut changer la direction du vent, il faut apprendre à orienter les voiles".
Le Millenaire
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