Le ventre mou de la RDC se trouve dans sa partie orientale. C’est de cette région que sont parties les différentes rébellions qui ont secoué ce pays.
La dernière en date, celle du CNDP de Laurent Nkunda, a été matée au début de l’année 2009.
Pour y arriver, il a fallu le concours de forces rwandaises.
L’entrée controversée des contingents rwandais au Congo, au mois de janvier 2009, avait abouti aux résultats spectaculaires.
Le leader du CNDP Laurent Nkunda a été arrêté et son mouvement anéanti dans un temps record et, pratiquement, sans accrochages.
Les éléments CNDP ont ainsi été, malgré eux, versés dans les rangs des FARDC et chargés de combattre les FDLR.
La fin brusque du CNDP aura été le meilleur cadeau de Kigali à Kinshasa.
Menace pour le pouvoir en place à Kinshasa, Laurent Nkunda et son CNDP devenaient à la fois gênant et dangereux pour le régime de Kigali.
Le Rwanda craignait de se faire fermer des robinets financiers par des pays occidentaux qui en avaient déjà assez de son soutien au CNDP en plus que ses stratèges n’étaient plus rassurés de pouvoir totalement maîtriser un Laurent Nkunda dont certains actes échappaient déjà au Rwanda.
Le leader du CNDP prenait de plus en plus de l’envergure politique et ses ambitions politiques, qui prenaient des dimensions nationales, commençaient à dépasser les visées du Rwanda en RDC, àsavoir, anéantir les FDLR.
Les régimes de Kigali et de Kinshasa avaient, chacun, un intérêt dans l’anéantissement du CNDP version Laurent Nkunda dont on ne savait plus contrôler les ambitions.
Emmanuel Kamanzi et Bosco Ntaganda ont été ainsi choisis pour diriger le CNDP en vue de satisfaire aux intérêts de Paul Kagame dans la région, tout en sauvegardant le régime de Kinshasa contre une rébellion qui ne cessait de prendre de l’ampleur.
Recherché par la Cour pénale Internationale, Bosco Ntaganda est tout de même un lourd fardeau pour Kinshasa. Son transfert à la CPI tarde parce que Kinshasa a encore besoin de sa présence à l’Est.
Cette opération qui a contenté Kinshasa et Kigali n’a pas fait le bonheur parmi certains membres de la communauté tutsi et même dans une frange des congolais qui commençaient à voir dans le CNDP la seule issue pour se défaire du régime Kabila en RDC.
Quelques lobbies tutsi considèrent que l’anéantissement du CNDP a pour conséquence l’affaiblissement de leur influence politique dans la région. Les deux régimes (Kinshasa et Kigali) en profite pour se consolider pendant que la question Tutsi reste sans solutions solides à l’Est du Congo.
Des pressions ont été multipliées sur Kigali afin de retarder ou empêcher le transfert de Laurent Nkunda au Congo.
Tentative d’une autre rébellion
Nkunda arrêté, CNDP anéanti, le problème est présentement celui de faire survire l’esprit de lutte et de résistance à l’Est de la RDC.
Des tentatives sont actuellement menées pour que, de cendres du CNDP, naisse une autre insurrection.
Des efforts sont orientés vers l’unification de tous les groupes armés oeuvrant dans les deux Kivu pour faire un seul qui sera sous commandement d’un sujet, de préférence, non tutsi.
Une manière de susciter l’adhésion populaire.
D’anciens éléments CNDP, des insurgés du plateau de Minembwe, quelques sujets mayi-mayi et même certains hommes de FARDC seraient déjà mis au parfum de ce complot.
Des sensibilisateurs venus notamment de l’Afrique du Sud auraient déjà sillonné les deux Kivu et l’idée prendrait déjà du chemin.
C’est plutôt le soutien extérieur qui poserait encore des problèmes.
Les concepteurs de cette éventuelle insurrection du Kivu ne veulent plus être pilotés par le Rwanda.
Pour eux, il est hors de question de travailler encore sous la coupe de Kigali qui vient de démontrer que pour des raisons de sauvegarde de son régime il peut tout sacrifier.
D’où alors pourront-ils trouver un soutien, l’environnement politique international ne se prêtant plus à une conquête du pouvoir en RDC par la guerre ?
Difficile de répondre à cette question dans les circonstances actuelles.
Quand les hostilités seront-elles déclenchées ? Au moment opportun pensent-on. Et ce moment sera déterminé en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain.
L’horizon des élections de 2011 avec les risques de contestation de ses résultats pourrait éventuellement servir de feu à mettre aux poudres.
Les FDLR encore pour longtemps
On a beau crié à l’anéantissement des FDLR, ils continuent toujours à semer la désolation dans la partie orientale du Congo. Sur le terrain, il ne se passe pas un mois sans que l’on enregistre d’attaques de ces hommes armés rwandais dans des localités et villages du Congo.
L’opération lancée par les FARDC a enfoncé d’avantage les FDLR dans les forêts et collines congolaises loin des frontières rwandaises. Leur présence est signalée présentement dans les territoires de Lubero et Beni dans la province du Nord Kivu et même dans le district de l’Ituri dans la province Orientale.
Après avoir passé plus de 15 ans en RDC, ces combattants FDLR ne peuvent qu’avoir la maîtrise, par cœur, de la cartographie de l’Est de ce pays. Ils savent donc par où se retirer en cas d’attaques ennemis.
Certains d’entre eux ont fondé des familles avec des femmes congolaises.
Ce qui constitue pour eux, un réseau d’informateurs qui les guident sur la manière de se mettre à l’abri des attaques et leur permettent de tendre des embuscades aux soldats congolais.
La stratégie est donc celle de s’éloigner des localités investies par les FARDC et de n’y revenir qu’en représailles.
A cette allure, ce n’est pas demain que les FDLR seront démantelés à l’Est de la RDC.
Les choses pourraient encore prendre des mois si pas des années.
Ce qui fait croire à certains observateurs qu’une option politique devrait aussi être envisagée en plus de la frappe militaire.
Sinon, les populations de l’Est resteront encore longtemps exposées aux tueries,massacres, pillages, viols des femmes et jeunes filles perpétrés par les uns et les autres.
Fronde dans les milieux mayi-mayi
Les nouvelles en provenance de la province du Nord Kivu ne sont pas du tout roses. Des groupes mayi-mayi qui avaient adhéré au processus de paix de Goma ont actuellement tendance à se rétracter. Ils accusent le gouvernement de n’avoir pas honorer ses engagements. Ils n’auraient pas trouvé leur compte dans tout qui a été convenu à Goma. Les promesses du gouvernement en rapport avec la libération des prisonniers et l’intégration dans les institutions de la République tardent à se réaliser.
Les mayi mayi ont donc l’impression d’avoir été floués. La tendance est donc actuellement à la reprise du chemin du maquis.
Connaissant leur penchant pour les FDLR, il faut redouter que leur retour dans les différents maquis ne puisse être profitable à ces combattants rwandais et donc complique l’équation de l’Est.
Le décor est donc bien planté pour le déclenchement d’autres hostilités à L’Est. Il suffit que ceux qui ont toujours rêvé d’un Congo divisé mettent la main à la patte pour que les choses se gâtent.
Les dirigeants congolais devraient donc prendre cette situation au sérieux.
Eviter des frustrations politiques qui sont souvent sources de tension, instaurer une bonne gouvernance et surtout donner des garanties que les prochaines élections seront libres et transparentes, sont à notre avis, la seule manière de barrer la route à une autre guerre.
Il faut craindre de donner aux pyromanes du Congo de quoi justifier leurs actes.
Joska Kaninda