FRPI, exploitation du pétrole par Total et vol du bétail

dscn8471.jpgFRPI, ou la force de résistance patriotique de l’Ituri, c’est le nom d’un groupe d’insurgés encore actifs dans le district de l’Ituri. Cette milice a de l’emprise sur une bonne partie du territoire d’Irumu. Il s’agit de la collectivité de Walendu/Bindi, la plus peuplée du district de l’Ituri.
Il y a peu, un processus d’intégration de ces miliciens de FRPI dans l’armée nationale a été amorcé. Mais, les résultats se font toujours attendre. Des délégations venant de Kinshasa se sont succédé à Bunia pour prendre langue avec les responsables de cette milice sans changer grand-chose sur le terrain. Les derniers six mois, il s’est observé une sorte de ralentissement de ce processus. Qu’est-ce qui bloque ce processus d’intégration ? A qui incombe ce retard ?
Ces atermoiements interviennent pendant que sur terrain, dans le territoire d’Irumu, l’on déplore la recrudescence des cas d’insécurité, de vol à mains armées et le phénomène coupeur des routes.
Devant cette insécurité récurrente, les communautés Hema et Ngiti du territoire d’Irumu ont organisé une réunion à Bogoro pour tenter de trouver des voies des solutions à ces problèmes. Qui sont auteurs de ces exactions ? Les commentaires vont dans tous les sens. Des doigts accusateurs sont pointés tantôt sur les éléments FRPI, tantôt sur les éléments FARDC ou encore sur des militaires déserteurs et autres anciens miliciens démobilisés.
Pour plus de lumière, nos limiers ont effectué le déplacement de Gety, le mardi 26 mars 2013. Dans ce chef lieu de la collectivité de Walendu/Bindi, ils se sont entretenus avec le chef de FRPI. Ce général rebelle a répondu à toutes les préoccupations des journalistes. Nous vous proposons, dans les lignes qui suivent, un condensé de cet entretien.

Son avis sur l’exploitation du pétrole par l’entreprise Total


Au mois de janvier 2012, l’entreprise Total a obtenu, du gouvernement congolais, le permis d’exploitation du pétrole dans le bloc 3 du graben Albertine. Depuis, rien ne se fait sur terrain. Les études qui devraient s’effectuer dans la région de Boga sont stoppées. Ceci, en raison du fait que la zone d’exploitation de Total échappe au contrôle du gouvernement. C’est Cobra Matata qui y trône avec son FRPI. Pourtant, ce permis d’une validité de trois ans expire dans deux ans.
Sur cette question, Cobra Matata rassure l’entreprise Total. Il invite cette firme à venir lancer ses travaux dans le territoire sous son contrôle. Nous ne pouvons pas faire obstacle à une entreprise ayant obtenu l’aval du gouvernement de Kinshasa, avait-il déclaré. Pour ce général rebelle, à l’instar des ONG internationales et nationales qui travaillent dans son rayon d’action, Total bénéficiera aussi de la protection de ses hommes. Ainsi, a-t-il demandé à Total de venir prendre langue avec lui et ensuite débuter ses travaux. L’exploitation du pétrole est une bonne chose que nous devons tous soutenir a-t-il soutenu.

De l’intégration de son groupe armé dans le FARDC


En dépit du retard observé dans le processus d’intégration de ses hommes dans les FARDC, Cobra Matata Banaloki reste tout de même confiant au gouvernement de Kinshasa. Je n’ai pas de choix, j’ai choisi la voie de la paix a-t-il confié aux journalistes. Ce chef pense que comme congolais, il a l’obligation de faire la différence avec les autres groupes armés. Son souci est d’épargner les populations des souffrances inutiles. Il a fait croire qu’il communique régulièrement avec les autorités militaires de Bunia, Kisangani et Kinshasa et a fait tout ce qui lui avait été demandé de faire : cessation des hostilités, regroupement des combattants.
Seulement il constate qu’aucune réponse n’a été, jusque là, réservée au cahier des charges que son groupe avait envoyé au gouvernement de Kinshasa. Il y a des préalables que nous avons exigés avant notre intégration, soutient-il. Du nombre de ces préalables il y a notamment l’amnistie générale, la reconnaissance des grades et la prise en charge des combattants. Pour Cobra Matata, l’amnistie doit concerner tous les combattants de l’Ituri ( en eux inclus même des ex combattants ituriens qui peuplent les prisons au Congo comme à l’étranger) et doit venir du chef de l’Etat Joseph Kabila. Il ne veut plus revivre une expérience amère. Apres avoir été mordu par un serpent, vous avez peur même d’un lézard a-t-il martelé. Rappelons ici que Cobra Matata était du nombre d’anciens chefs des milices de l’Ituri qui avaient répondu à l’appel de Kinshasa en 2004. Hélas, cela n’avait pas empêché les autorités de Kinshasa de les emprisonner. Ces autres compagnons comme le général Godas et le général Jérôme Kakwavu croupissent dans les prisons de Kinshasa sans oublier Mathieu Ngudjolo qui a été transféré à la CPI.
Visiblement, Cobra Matata n’est plus prêt à croire au premier venu. Il veut des garanties du Chef de l’Etat Joseph Kabila et de lui seulement pour éviter de retomber dans les erreurs du passé.


Et si cela tardait à venir ?

Optimiste, ce chef de FRPI estime qu’il y a des choses que le gouvernement peut déjà faire en attendant. C’est le cas de la prise en charge de ses militaires et la facilitation de la mobilité de ses éléments à travers la République. Pour lui, le gouvernement avait responsabilisé son groupe pour la sécurisation des espaces sous son contrôle. Comment bien le faire avec des hommes non pris en charge ? Cobra Matata pense que l’Etat Congolais devrait déjà penser à envoyer quelque chose à ses hommes pour bien les motiver à bien assurer la sécurité. Aussi, souhaite-il qu’il leur soit autorisé de circuler librement sur le territoire congolais sur présentation d’une feuille de route. Nous avons aussi besoin de nous rendre à Bunia, à Kisangani et pourquoi pas à Kinshasa a-t-il souligné.

FRPI, une milice Ngiti ?


Cobra Matata s’inscrit en faux contre ceux qui tentent de présenter son groupe armé comme une affaire de la communauté Ngiti. Selon lui, sa rébellion regorge des congolais de tout bord, en commençant par les ressortissants de 21 communautés vivant en Ituri. Il y a, dans son Etat-major, des officiers supérieurs venant fraichement de Kinshasa et donc des non ituriens. Il avoue avoir le contrôle de tous ses éléments. Preuve : tous les présumés ténors des tendances dans la FRPI étaient à ses côtés ce jour. Une manière de faire voir aux journalistes que la discipline et l’unité de commandement ont droit de cité dans la FRPI.
A propos de l’insécurité et du vol du bétail en territoire d’Irumu, Cobra Matata plaide son groupe non coupable. Il attribue ces actes de vandalisme aux hommes armés non identifiés : militaires déserteurs, anciens miliciens démobilisés et autres bandits à mains armées. Ceux qui présentent la FRPI sous ce mauvais jour veulent inutilement réveiller le vieux démon de la guerre interethnique de triste mémoire. Ce chef rebelle soutien que les vaches volées qui passent dans le territoire sous son contrôle, une fois dénichées, sont saisies et restituées à leurs propriétaires. Signe qu’il n’encourage pas cette pratique. Au contraire, il a promis de déférer devant la justice militaire tout élément FRPI qui se trouverait impliqué dans cette salle histoire du vol du bétail.
Faire de l’amalgame en confondant la FRPI à la communauté Ngiti, puis imputer le vol du bétail à la FRPI n’est ni plus ni moins que chercher à opposer les Hema aux Ngiti. Ce qui n’est pas bon pour ce district post conflit. Le vol est une infraction qui doit concerner les individus concernés et non des communautés tribales.

L’intervention du gouverneur Jean Bamanisa sollicité


En guise de mot de la fin, ce rebelle a salué l’élection de Jean Bamanisa comme gouverneur de la province Orientale. Pour lui, cette élévation d’un fils du territoire d’Irumu au rang du gouverneur peut faciliter la précipitation du processus d’intégration des éléments FRPI dans l’armée nationale. En tant que fils du coin, il a tout intérêt à stabiliser la paix dans son territoire d’origine. Ce qui mettra fin au prétexte faisant de la présence de la FRPI en territoire d’Irumu une source d’insécurité.
Ainsi, souhaite-t-il que le gouverneur Jean Bamanisa s’implique personnellement pour qu’une solution rapide soit trouvée au problème de l’intégration des miliciens FRPI dans l’armée nationale.
Cobra Matata Banaloki a terminé son propos en invitant les autorités au niveau national de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour hâter le processus d’intégration de la FRPI dans les FARDC.

Joska Kaninda

 

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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