Les probables élections présidentielles de 2011 préoccupent au plus haut point les habitants de l’Est de la RDC, ceux là mêmes qui avaient donné une large part de leurs suffrages à Joseph Kabila lors des dernières élections de 2006. Dans des cercles et salons politiques de cette partie du pays, les spéculations vont dans tous les sens. Et pour cause ? Très peu d' habitants de l’Est croient encore en Joseph Kabila. Ils lui reprochent la no-tenue des promesses faites lors de sa campagne de 2006, l’incapacité du gouvernement à restaurer la paix à l’Est de la RDC, la dégradation sans cesse croissante des conditions sociales des populations…
Joseph Kabila n’est plus cette star politique de 2006. Nombreux sont ceux qui regrettent de lui avoir accordé leur voix en 2006. Il faut lui trouver une alternative. A ce sujet, ce ne sont pas des noms qui manquent à être avancés dans cette partie du Congo : Moise Katumbi, Etienne Tshisekedi, Mbusa Nyamwisi, Vital Kamerhe… pour ne citer que ceux-là. Politique de proximité oblige, Mbusa Nyamwisi pourrait, s’il présentait sa candidature à la magistrature suprême, rafler une bonne part des voix des électeurs de l’Est d’où il est natif. Hélas, il ne s’est pas encore prononcé à ce sujet. Peut être attend-il que le très prochain Congrès de son parti le décide. Mais qui est ce Mbusa Nyamwuisi ?
La cinquantaine révolue et le murissement accéléré devrait arriver à maturation probablement lors des échéances prochaines. Le parcours de l’actuel Ministre de la Décentralisation et Aménagement du Territoire le place en ordre utile dans le classement des candidats à la candidature aux présidentielles de 2011.
Entré en politique vers les années 90, aux côtés de son frère aîné Enoch NYAMWISI, à la création de la Démocratie Chrétienne Fédéraliste, en sigle D.C.F., Antipas MBUSA NYAMWISI n’est plus un personnage à présenter dans le microcosme politique de la République Démocratique du Congo. Il a pratiquement été tout, jusqu’à être Ministre d’Etat en charge des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale.
Détenteur d’une licence en Sociologie en 1989 à l’Université de Kisangani, il est l’Autorité Morale du Rassemblement Congolais pour la Démocratie/Kisangani-Mouvement de Libération, RCD/K-ML en Sigle, son parti politique.
Monsieur Antipas MBUSA NYAMWISI a fait montre d’un sens élevé de patriotisme en posant un acte de bravoure et plein de beaucoup d’abnégation lorsqu’il fallait réaliser la Réunification de la partie Est du Pays à celle de l’Ouest, à un moment où le complot de Balkanisation de la RDC était déjà conclus dans certains milieux des décideurs. Surtout qu’à ce temps là précis, un tel choix était suicidaire aux vues des pesanteurs qui pesaient sur lui et sur la Région. Ce pionnier de la Réunification Nationale a suffisamment démontré qu’il a réellement une vision pour la RDC et qu’il incarne des valeurs. C’est dans ce cadre qu’en 2006, voulant consolider cette Réunification Nationale chèrement acquise, et restant fidèle à sa doctrine du Patriotisme Responsable, il avait jugé bon de se désister en faveur du candidat Joseph Kabila alors qu’une bonne partie de la population avait déjà jeté son dévolu sur lui. Pour beaucoup il serait l’arbitre lors de ce scrutin là. Evidemment ce geste avait contribuer à la victoire de Kabila.
Durant les années passées à la tête de la diplomatie Congolaise(Ministère de la coopération Régionale et ensuite Celui des Affaires Etrangères et Coopération Internationale), il s’est attelé à renouer le fil du dialogue avec essentiellement les Pays voisins à travers notamment les processus de la Conférence Internationale sur la paix, la Sécurité et le Développement des Pays des Grands Lacs (CIRGL) qui a créé le contexte extérieur de la tenue des élections générales de 2006 et abouti à la signature du pacte de Stabilité, de Sécurité et de Développement ; de la Tripartite + 1 qui, avec l’accompagnement des USA et de la MONUC, avait contribué à la normalisation des relations avec le Burundi, l’Ouganda et le Rwanda permettant ainsi la relance de la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL).
Dans le cadre de sa participation régulière aux sommets des Organisations Internationales, continentales et régionales qui ont replacé la RDC au sein de la Communauté Internationale, il a mené les activités préliminaires qui ont abouti à l’organisation, à Kinshasa, des sommets de la CEEAC, de la SADC et bientôt de la Francophonie, ce dernier étant obtenu depuis Montréal en 2008.
Dans le même temps, il a initié un assainissement et une restructuration de l’appareil diplomatique Congolais en passant par la Conférence des Ambassadeurs, le rapatriement progressif des diplomates fin termes, etc. L’histoire le retiendra comme le seul chef de la diplomatie qui, en vue de redorer l’image du Congo à l’Etranger, n’a pas fait de l’envoi en poste des diplomates un business politico-financier au point de n’avoir envoyé personne.
On retiendra également à son actif, son implication personnelle dans la disponibilisation du passeport biométrique ; le rapatriement volontaire des combattants ex-FAR et interahamwe grâce au Communiqué de Nairobi du 09 novembre 2007 matérialisé à KASIKI dans le Sud LUBERO au NORD/KIVU, le 31 juillet 2008 par le désarmement volontaire et démobilisation d’une centaine d’ex-FAR et Interahamwe.
Jusqu’à ce jour, son passage à la tête de ce ministère de souveraineté continue à faire parler de lui et le maintient sur l’orbite des grands ministres des affaires étrangères que la RDC a connus par ce que sa prestation à l’intérieur comme à l’extérieur a donné une image reluisante de la République.
Cette action politique et diplomatique, il l’a marqué lors de sa première année à la tête du Ministère de la Décentralisation et Aménagement du Territoire, avec l’adoption du Cadre Stratégique de Mise en Œuvre de la Décentralisation (CSMOD) le 11 juin 2009, véritable feuille de route de la Décentralisation en RDC jusqu’à l’horizon 2019 ; le lancement de la campagne nationale de communication sociale visant à vulgariser les textes des lois sur la décentralisation en vue de son appropriation par les différents acteurs de ce processus ; l’érection de certaines agglomérations en villes et communes par décret du Premier Ministre en ce qui concerne 7 provinces ; la conduite de plusieurs études, notamment sur l’impact du découpage territorial, le renforcement des capacités des institutions provinciales ; etc.
Que peut inspirer ce parcours ?
Peut-on réaliser des prouesses de cette nature et continuer à faire un profil bas ou rouler pour quelqu’un d’autre ? Le bon sens commande de prendre ses responsabilités dans certaines mesures. Et surtout quand le pays se meurt à en croire les propos de BECHIR BEN YAHMED, patron de JEUNE AFRIQUE (dans son numéro 2598-2599 du 24 octobre au 6 novembre 2010) lors de la célébration de 50 ans de cet hebdomadaire africain, je cite : Attention, là, il y a une limite. Exemple : jusqu’à quand va-t-on se taire sur ce qui se passe en RDC ? Le bilan de KABILA est désastreux. Le pays n’est ni gouverné, ni géré. Il est pillé, il dérape. Et je pense qu’il faut que jeune Afrique se prononce. Il y a une limite au-delà de laquelle le silence n’est plus possible. C’est un grand pays qui est en train d’être bradé avec la complaisance de la communauté internationale, l’ONU, les Etats-Unis, la France. Ce malheureux pays connait la même malédiction que la Guinée. Il est sorti de Mobutu pour tomber dans KABILA. Et cela fait cinquante ans que ça dure…Fin de citation.
Toutes ces raisons cumulées font qu’il ne faut pas être savant pour comprendre que tout homme sérieux ne peut plus composer avec le candidat Joseph Kabila pour ce nouveau quinquennat à solliciter lors des échéances de novembre prochain ; a fortiori l’homme politique de la trempe de monsieur ANTIPAS MBUSA NYAMWISI, relégué à la queue dans un régime où il a tout donné de manière incontestable et substantielle. D’aucuns se demandent pourquoi il traine encore à démissionner par ce que sa place n’est pas là. Antipas MBUSA NYAMWISI demeure l’un des piliers et leviers sur lesquels l’avenir de la RDC devra se construire dans la refondation d’un Etat de droit auquel il croit.
Le poids politique de MBUSA NYAMWISI lui confère le statut d’un présidentiable et non de faiseur des Rois. Il ne mérite pas ça du tout. Rappelez-vous qu’après s’être désisté en faveur de KABILA, il s’est tout de même classé 11ème sur une trentaine des candidats sans avoir battu campagne et dépassant même certains Vice-Premiers Ministres en fonction pour donner la victoire à Joseph Kabila. Cette humilité politique qu’incarne le leader du RDC/K-ML devrait amener le camp présidentiel de lui rétribuer à sa juste valeur pour avoir concilier sa loyauté à la cohérence politique qu’il a su démontrer jusqu’au bout à l’endroit de Joseph Kabila en appelant tout son électorat dans son fief de l’Est du pays à voter pour le candidat Kabila en 2006. Comprendre qui peut comprendre.
Aujourd’hui, à la suite des rendez-vous manqués et des engagements formels pris pour gouverner ensemble par Joseph Kabila, sa candidature est réclamée aux présidentielles de novembre 2011 par une bonne part de la population dans l’Est de la R D Congo.
JEAN BUSUKU